L’homme, maître de son destin : le sujet ne peut que motiver l’humanité, celle qui n’en finit pas de décider et d’agir, trop souvent contre nature, partant du principe que l’homme est maître de l’univers, celle qui au contraire s’inquiète pour son futur, eu égard aux atteintes constantes faites à la nature, à l’environnement, à l’humanité elle-même, voire celle qui, indifférente à toutes ces grandes questions philosophiques, sociétales et politiques, ne manque pas de s’indigner, quand elle se trouve confrontée à la toxicité sociale, alimentaire, climatique, répressive… « L’humanité n’est pas un état à subir. C’est une dignité à conquérir ». Claude Vautrin fait volontiers sien le propos de Vercors, l’écrivain résistant (face aux nazis) à qui l’on doit, entre autres, le « Silence de la mer ». L’enjeu aujourd’hui comme hier est bien de parler, d’échanger.
En 1947, Vercors écrit dans l’ouvrage collectif L’heure du choix (Minuit) un texte intitulé La fin et les moyens. « Ce qui aide encore les hommes à vivre, au sein de ce monde misérable…, c’est de savoir que ce n’est pas immuable […]. 72 ans plus tard, le propos résonne toujours. Il surprendra, et c’est peut-être tout l’intérêt du rendez-vous et du débat ouverts lors de ces IM&E, car lié à la Corée du Nord, « le royaume ermite », si décrié, montré du doigt, pour le moins caricaturé. Claude Vautrin s’attèle donc à l’exercice périlleux, convaincu de l’utilité de découvrir – c’est le propre de ce rendez-vous philosophique et culturel – des territoires inconnus. Suite à son séjour en Corée du nord et aux rencontres et entretiens qu’il a suscités, sachant qu’aucun sujet n’est tabou, l’auteur de l’ouvrage Corée du Nord, l’autre dimension ouvre donc le débat, photos à l’appui, et devoir de mémoire en préambule. L’histoire de cette région du monde sujet à la convoitise des grandes puissances (Chine, Russie, Japon, Etats-Unis) est évoquée, comme l’émergence et la mise en œuvre de la doctrine, qui est aussi philosophie, du Juche, imprégnée de confucianisme, et d’un fort esprit d’indépendance. Maître de tout, l’homme y est avant tout « indépendant, conscient et créatif ». Au-delà des clichés qui lui sont attachés, cette idéologie « tonique et motrice » dicte, dans un environnement pour le moins sensible, l’actuel développement de la société nord-coréenne, via notamment l’extrême attention portée à l’éducation et aux scientifiques et chercheurs, à l’autonomie de gestion des entreprises, fut-ce dans un système étatique, au choix du localisme, en termes de sécurité alimentaire, à la part belle faite aux énergies renouvelables… certaines révélations ne manquant pas d’attraits, telle l’existence depuis 2011 à Pyongyang d’une Université scientifique créée avec des fonds américains ! Ou encore la présence d’un des premiers gisements mondiaux de terres rares dans le pays. L’avenir s’y dessinerait-il ? Partageant ses connaissances et son expérience, Claude Vautrin rappelle qu’imaginer l’avenir de l’humanité relève d’une démarche qui ne peut se priver d’aller « quérir, chercher, sur toutes les parcelles de la planète, pour mieux comprendre les voies différentes qui s’y sont ouvertes ». Sachant, et il en fait une des dédicaces de mon ouvrage, en citant son écrivain fétiche, le Chilien Luis Sepulveda que « le visage humain ne ment jamais : c’est l’unique carte qui enregistre tous les territoires que nous avons habités »
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